Les régentes de Savoie, des femmes de valeur (XIIe – XVIIIe siècle)

Un certain nombre de comtesses puis duchesses de Savoie vont se révéler d’énergiques femmes qui géreront leurs domaines faisant face aux hostilités de leur propre famille et de leurs voisins territoriaux. Quatre d’entre elles sont issues de la famille royale de France.

Adélaïde de Suse  (1015 - 1091)

Margrave de Suse et comtesse de Turin, (veuve d’Herman IV duc de Souabe et d’Henri de Montferrat), Adélaïde épouse en 3e noce Othon Ier de Savoie, fils d’Humbert aux blanches mains, le fondateur de la dynastie.

Elle apporte de vastes possessions au nord de l’Italie dont Suse, clé de passage du Mont-Cenis. Ce qui fera plus tard du duc de Savoie un personnage important que les français vont ménager afin de pouvoir traverser ses territoires pour se rendre en Italie.

Elle a participé à la gestion des états avec son mari. Beaux-parents d’Henri IV de Franconie, empereur romain qui a épousé leur fille Berthe, ils interviennent comme conciliateurs dans son opposition au Pape lors de la querelle des investitures. Mais leur 2e fille épousera Rodolphe de Souabe qui entrera en compétition pour le titre d’empereur contre son beau-frère Henri IV.

Après la mort de Othon en 1060, elle assure la régence pendant la minorité de ses 2 fils Pierre Ier puis Amédée II et même de son petit fils. Elle permet le passage de l’empereur Henri IV par la Savoie et l’accompagne pour se rendre auprès du pape à Canossa.

Bonne de Bourbon  (1341 - 1403)

En 1349, Humbert II, dauphin de Viennois, ruiné vend son territoire au roi de France Philippe VI qui en fera le fief de son fils aîné qui par la suite prendra le titre de « dauphin ».

Mais, Amédée VI avait également des vues sur ce domaine et ses troupes envahissent une partie du pays. Philippe VI, en butte aux anglais sur le territoire de France préfère négocier : par le traité de Paris, la Savoir récupère des terres qui enclavaient ses possessions et abandonne ses prétentions sur le Viennois.

Peu après il épouse une nièce de Philippe VI, Bonne de Bourbon, fille de Pierre Ier de Bourbon et d’Isabelle de Valois, sœur de Philippe VI.

Elle joua un tel rôle dans le gouvernement de la Savoie qu’elle y gagna le surnom de « Madame la Grande ».

Son époux lui confia la régence lorsqu’il partit en Orient de 1366 à 1367. Puis, par testament il lui confie la régence à vie après sa mort en 1383.

Majeur, son fils le comte Amédée VII de Savoie négocie un accord avec sa mère. Il gouverne seul mais lui octroie des biens matériels et des domaines.

En 1391, à la mort d’Amédée VII elle entre en conflit avec sa bru, Bonne du Berry qui veut également exercer la régence. Les états de Savoie tranchent en sa faveur, Bonne de Berry doit s’exiler. De 1391 à 1397, elle assure la régence de son petit-fils Amédée VIII jusqu’à son émancipation.

Yolande de France  (1434 - 1478)

Yolande est la fille de Charles VII et de Marie d’Anjou, et par la même la sœur de Louis XI.

En 1435, nait Amédée IX. Aussitôt ses parents, Louis Ier et Anne de Lusignan forment le projet de le marier à Yolande par un traité conclut en 1436 entre et le roi de France et le duc de Savoie. Elle l’épouse en 1452. Le jour du mariage Louis accueille le futur Louis XI, qui accompagne sa sœur, et fait célébrer le mariage de celui-ci avec sa fille Charlotte, malgré l’opposition de Charles VII.

Elle sera duchesse consort de Savoie avant de devenir régente de 1472 à 1478 pour son fils Philibert Ier. Mais Louis et Anne eurent 4 fils et ses beaux-frères en conçurent de la jalousie. Elle est épaulée par Louis XI tant qu’elle reste opposée à son proche voisin Charles le Téméraire, mais doit composer avec un conseil formé par ses beaux-frères. Cependant elle cherchait aussi à se concilier les bonnes grâces du duc de Bourgogne et proposait d’unir son fils Philibert à sa seule héritière Marguerite de Bourgogne. Elle finit par céder aux avances de Charles le Téméraire et rompt les liens avec la France. Mais, devant les tergiversations du duc, elle entame des pourparlers de fiançailles avec Galéas Sforza, duc de Milan mariée à Bonne de Savoie, une de ses belle-sœur pour unir Philibert à leur fille Blanche-Marie. Charles finit par apprendre qu’elle renouait des liens avec la France la fait capturer. Louis finira par envoyer des troupes pour la libérer.

A sa mort l’anarchie s’installe avec le règne de ses 2 fils Philibert Ier puis Charles Ier.

Blanche de Montferrat  (1472 - 1519)

Elle est la fille de Guillaume VIII de Montferrat et d’Elisabeth-Marie Sforza. En 1485, Blanche de Montferrat (1472 - 1519) épouse le 2e fils de Yolande, Charles Ier de Savoie. Ils ont le temps d’avoir 2 compte de son fils Charles-Jean Amédée âgé d’un an. Mais il mourra à l’âge de 7 ans laissant la place à son oncle Philippe II de Bresse.

Marguerite de Habsbourg

parmi les duchesses de Savoie qui ont marqué leur temps, n’oublions pas la tante de Charles Quint qui a épousé le fils de Philippe II de Bresse, Philippe II le Beau qui lui laissera le gouvernement de la Savoie.

Christine de France (1606 - 1663)

C’est la dernière fille d’Henri IV et de Marie de Médicis.

Charles-Emmanuel est marié à la nièce de Louis XIII, Françoise d’Orléans dont le caractère docile ne devrait pas remettre en question le pouvoir de Christine. (mais c’est la 1ere fois qu’un duc de Savoie n’épouse pas la fille d’un empereur ou d’un roi.).

Elle devient duchesse en 1630, lorsque son mari succède à son père, son frère aîné étant mort. Il ne règne que 7 ans.

Comme au temps de Charles-Emmanuel Ier, un lien fort s’est tissé avec les Habsbourg de Madrid, la présence de Christine de France en Savoie constitue un atout essentiel pour la politique française en Italie.

Pendant 10 ans, de 1637 à 1647, elle exerce d’abord la régence pour son Ier fils François-Hyacinthe qui n’a que 5 ans. Mais il meurt au bout d’une année. Son 2 fils Charles-Emmanuel. II n’a que 4 ans. Elle reste régente et reçoit le surnom de « Madame Royale ». Mais elle doit faire face aux revendications de ses beaux frères le cardinal Maurice de Savoie et Thomas de Savoie Carignan qui avaient des préférences pour les Habsbourg. Cependant Louis XIII soutien sa sœur et Thomas se ralliera à la France.

Elle noue des alliances pour ses filles et son fils en se tournant vers la France et l’Italie. 

Marie-Jeanne Baptiste de Savoie dite Mademoiselle de Nemours  (1644 - 1724)

Son père est Charles de Savoie, duc de Nemours et sa mère Elisabeth de Bourbon-Vendôme, petite fille d’Henri IV par son fils illégitime César de Vendôme. Marie Jeanne est au cœur de tractations matrimoniales :

Christine de France souhaite maintenir les liens entre Savoie et France et envisage de marier son fils Charles-Emmanuel II avec Marie-Jeanne Baptiste, mais le ministre de Louis XIV, le cardinal de Mazarin s’y oppose trouvant à la jeune fille un caractère trop affirmé, et souhaitant une épouse plus docile.

Il propose Françoise-Madeleine d’Orléans, cousine de Louis XIV, tandis que Marie-Jeanne est fiancée au Charles de Lorraine, neveu et héritier du duc de Lorraine Charles IV. Mais les fiançailles sont rompues lorsqu’il apparaît que Charles IV a signé le traité de Montmartre assujettissant la Lorraine à la France et que la famille ducale doive s’exiler.

Pendant ce temps Françoise-Madeleine d’Orléans meurt et le mariage redevient à l’ordre du jour, d’autant plus que Mazarin aussi rendu l’âme.

En 1675, elle assure la régence de leur fils unique Victor-Amédée. Ambitieuse et souhaitant garder le gouvernement de la Savoie, elle envisage le mariage de son fils avec sa nièce l’héritière du Portugal Isabelle Louise Josepha, fille de Pierre II et Marie-Françoise de Savoie Nemours ce qui aurait obligé son fil à se rendre au Portugal. Mais sans succès.

Finalement, par un coup de force Victor-Amédée enlève le gouvernement à sa mère, mais pour garder de bonnes relations avec la France, il épouse une nièce de Louis XIV, Anne-Marie d’Orléans.

Comme sa belle-mère, la cour de Savoie lui donnera le titre de « Madame Royale ».

@ Les princesses assassines de DESPRAT J.P